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Il
faut assurément chercher l'origine de la fête de la Nativité de la
sainte Vierge en Orient où le synaxaire (1)de Constantinople la marquait déjà
au 8 septembre, selon ce qu'avait décrété l'empereur Maurice (582 +
602). Il est probable que l'Eglise
de Jérusalem fut la première à honorer le souvenir de la Nativité de
Notre-Dame qu'elle célébrait dans une basilique proche de la piscine
probatique, sur l'emplacement de la maison où, suivant la tradition,
serait née la sainte Vierge. La
Nativité de la sainte Vierge est mentionnée dans les homélies d'André
de Crète (660-740) : Aujourd'hui comme pour des noces, l'Eglise se pare
de la perle inviolée, de la vraie pureté. Aujourd'hui, dans tout l'éclat
de sa noblesse immaculée, l'humanité retrouve, grâce aux mains divines,
son premier état et son ancienne beauté. Les hontes du péché avaient
obscurci la splendeur et les charmes de la nature humaine ; mais, lorsque
naît la Mère de celui qui est la Beauté par excellence, cette nature
recouvre en elle ses anciens privilèges, elle est façonnée suivant un
modèle parfait et entièrement digne de Dieu. Et cette formation est une
parfaite restauration et cette restauration est une divinisation et cette
divinisation, une assimilation à l'état primitif. Aujourd'hui, contre
toute espérance, la femme stérile devient mère et cette mère, donnant
naissance à une descendance qui n'a pas de mère, née elle-même de
l'infécondité, a consacré tous les enfantements de la nature.
Aujourd'hui est apparu l'éclat de la pourpre divine, aujourd'hui la misérable
nature humaine a revêtu la dignité royale. Aujourd'hui, selon la prophétie,
le sceptre de David a fleuri en même temps que le rameau toujours vert
d'Aaron, qui, pour nous, a produit le Christ rameau de la force.
Aujourd'hui, une jeune vierge est sortie de Juda et de David, portant la
marque du règne et du sacerdoce de celui qui a reçu, suivant l'ordre de
Melchisédech, le sacerdoce d'Aaron. Pour tout dire en un mot, aujourd'hui
commence la régénération de notre nature, et le monde vieilli, soumis
à une transformation divine, reçoit les prémices de la seconde création. A
Rome, on célébrait alors la dédicace de la basilique du martyr Adrien
et il faudra attendre le pontificat du pape Serge I° (687-701) pour
trouver une trace incontestable de la célébration de la Nativité de la
sainte Vierge où le Pape, en sandales, faisait procession de la basilique
Saint-Adrien à celle de Sainte-Marie-Majeure. Les vieux livres
liturgiques assignaient à cette fête les mêmes chants qu'à la solennité
de l'Assomption. Benoît
XIV (1740-1758), dans l'Histoire des Mystères et des fêtes, raconte que
chaque année, au 8 septembre, un solitaire entendait des chants célestes
; quand il en demanda la cause à Dieu, il lui fut répondu que c'était
en l'honneur de la naissance de la Vierge Marie qui se célébrait au Ciel
et qu'il en était averti car Marie étant née pour les hommes, il
devrait faire en sorte que cette fête fût aussi célébrée sur terre.
Le solitaire se rendit auprès du Pape qui, au récit de la vision,
institua la fête de la Nativité de la sainte Vierge. En
France, la fête la Nativité de sa sainte Vierge porta longtemps le titre
de Notre-Dame Angevine, rappelant que la Vierge Marie, apparut, en 430, près
de Saint-Florent, au saint évêque Maurille d'Angers pour lui demander
l'institution de la fête de sa Nativité . Avec le concours efficace du
roi Robert le Pieux, Fulbert, évêque de Chartres (+1028) contribua
beaucoup à introduire la fête de la Nativité de la sainte Vierge dans
le nord du Royaume ; la nuit même de cette fête, sa cathédrale ayant été
détruite par un incendie, il jeta les fondement de celle que nous
connaissons aujourd'hui, dédiée à la Nativité de Notre-Dame. A
la mort le pape Célestin IV (1243), Frédéric II retint prisonniers des
cardinaux pour que le conclave ne se réunît pas ; les prisonniers firent
le vœu solennel de donner un octave à cette fête s'ils étaient rendus
à la liberté ; libérés, ils élurent Innocent IV qui, au premier
concile de Lyon (1245) accomplit le vœu. Grégoire XI fit une vigile qui
fut célébrée à Anagni. L'Ecriture
ne parle guère de la naissance de la Sainte Vierge et il faut se référer
ici aux traditions comme le firent les textes apocryphes en termes
merveilleux. Naissance
de Marie, la sainte qui engendra Dieu, très glorieuse mère de Jésus-Christ Chapitre
premier. Dans les histoires des douze tribus d'Israël, on dit que Joachim
était un homme comblé de richesses, mais qu'il apportait des offrandes
doubles, en disant : " Ce que je donne en excédent sera pour tous ;
je l'offre en expiation de mes péchés, pour que le Seigneur me soit
propice. " Etant
arrivé le jour solennel du Seigneur où les fils d'Israël apportaient
leurs offrandes, Ruben se dressa devant Joachim et lui dit : Il ne t'est
pas permis d'être le premier à déposer tes offrandes, car tu n'as pas
engendré en Israël. Et
Joachim fut comblé de tristesse, et il alla consulter les documents des
douze tribus du peuple, disant : Je verrai dans les documents des douze
tribus d'Israël si j'ai été seul à n'avoir pas engendré en Israël.
Il chercha et trouva que tous les justes avaient engendré de la postérité
en Israël. Mais il se souvint aussi du patriarche Abraham, et qu'en ses
derniers jours Dieu lui avait donné un fils, Isaac. Alors,
comblé de tristesse, Joachim ne se présenta point devant sa femme, mais
il se rendit au désert ; il y planta sa tente et jeûna quarante jours et
quarante nuits, se disant à lui-même : Je ne descendrai ni manger ni
boire avant que le Seigneur mon Dieu m'ait visité, et la prière sera ma
nourriture et ma boisson. Chapitre
deuxième. Cependant sa femme Anne pleurait, ayant deux raisons de gémir.
Je me désolerai sur mon veuvage, disait-elle ; je me désolerai sur ma stérilité. Étant
arrivé le jour solennel du Seigneur, Judith, sa servante, lui dit :
Jusques à quand auras-tu l'âme abattue ? Voici le jour solennel du
Seigneur ; tu n'as pas le droit de pleurer. Mais prends ce serre-tête que
m'a donné mon ancienne maîtresse ; je ne puis m'en orner car je suis
serve et il porte le signe de la race royale. Anne
répondit : Eloigne-toi ; je ne ferai rien de tel, car le Seigneur m'a
comblée d'humiliations. Sans doute est-ce un méchant qui t'a donné ce
bandeau et tu essaies de me faire complice de ta faute.
Mais Judith répartit : Quel mal pourrais-je te vouloir pire que
celui que tu as, puisque le Seigneur a clos ton sein, afin qu'il
n'engendre pas de postérité en Israël ! Alors,
au comble de l'affliction, Anne ôta ses habits de deuil, elle se lava la
tête, revêtit ses habits de noce, et, vers la neuvième heure, descendit
se promener au jardin. Elle vit un laurier, s'assit sous ses branches et
se mit à invoquer le Tout-Puissant : Dieu de mes pères, bénis-moi,
exauce ma supplication, comme tu as béni Sarah dans ses entrailles et lui
as donné son fils Isaac. Chapitre
troisième. Et levant les yeux vers le ciel, elle vit dans le laurier un
nid de passereaux, et elle se reprit à gémir, se disant pour elle-même
: Pitié
de moi ! qui donc m'a engendrée, quelles entrailles m'ont enfantée, pour
que je sois devenue maudite parmi les fils d'Israël, que je doive être
chassée avec outrage du Temple du Seigneur ? Pitié
de moi ! à quoi donc ressemblé-je ? Pas même aux petits oiseaux du ciel
, car les oiseaux du ciel sont féconds devant vous, Seigneur. Pitié
de moi ! à quoi donc ressemblé-je ? Pas même aux bêtes sauvages de la
terre, car les bêtes sauvages de la terre sont fécondes devant vous,
Seigneur. Pitié
de moi ! à quoi donc ressemblé-je ? Pas même à ces eaux que voilà,
car ces eaux sont fécondes devant vous, Seigneur. Pitié de moi ! à quoi
donc ressemblé-je ? Pas même à cette terre que voilà, car cette terre
porte des fruits en leur temps, et elle vous bénit, Seigneur ! Chapitre
quatrième. Or voici qu'un ange du Seigneur apparut et lui dit : Anne,
Anne, le Seigneur a entendu ta plainte. Tu concevras, tu engendreras, et
l'on parlera de ta progéniture par toute la terre. Anne répondit : Aussi
vrai que vit le Seigneur mon Dieu, si j'enfante soit un fils, soit une
fille, je le consacrerai au Seigneur mon Dieu pour qu'il le serve tous les
jours de sa vie ! Alors
deux anges arrivèrent auprès d'elle, lui disant : Voici que Joachim, ton
homme, s'en vient vers toi avec ses troupeaux, car un ange du Seigneur est
descendu à lui et lui a dit : - Joachim, Joachim, le Seigneur a entendu
ta plainte. Descends d'ici, car voici que ta femme Anne va concevoir dans
ses entrailles. Et
Joachim descendit. Il appela ses bergers et leur dit : Apportez-moi dix
agneaux sans tache et parfaits ; ils seront pour le Seigneur mon Dieu.
Apportez-moi aussi douze des veaux les plus tendres ; ils seront pour les
prêtres et le Conseil des Anciens. Et cent chevreaux seront pour tout le
peuple. Et
voici que Joachim arriva avec ses troupeaux. Anne, qui se trouvait debout
sur le seuil, le vit venir, courut à lui et s'accrochant à son cou, lui
dit : Maintenant, je sais que le Seigneur Dieu m'a comblée de bénédictions,
car j'étais comme veuve et je ne le suis plus; j'étais stérile et mes
entrailles vont concevoir. Et ce fut le premier soir que Joachim reposa
dans sa maison. Or
les mois d'Anne s'accomplissaient, et, au neuvième, elle enfanta. Et elle
demanda à la sage-femme : Qu'ai-je mis au monde ? Celle-ci répondit :
Une fille. Et Anne reprit : Elle a été glorifiée en ce jour, mon âme !
et elle coucha l'enfant. Puis les jours d'usage étant accomplis, elle se
releva, se lava, donna le sein à son enfant et l'appela Marie. Livre
de la naissance de la bienheureuse Marie et de l'enfance du Sauveur L'ouvrage
commence par un prologue qui prétend expliquer qu'il fut écrit par
" le bienheureux prêtre Jérôme ", et que son intention est de
relater la vérité, contre certains " livres apocryphes "
pleins d'hérésies. Mais, dans divers manuscrits, ce prologue se termine
par un paragraphe qui assure que l'auteur est " Jacques, fils de
Joseph ", ce qui contredit au début , mais ce qui prouve que le
texte latin est dans une étroite dépendance du " Protévangile de
Jacques ". De ce texte nous ne donnons ici que les passages
qui complètent ou modifient ce que le " Protévangile de
Jacques " contenait déjà. L'ange
apparut de nouveau à Joachim, pendant son sommeil, et lui dit : Je suis
l'ange qui t'a été donné par Dieu comme gardien ; descends et retourne
auprès d'Anne sans crainte car les bonnes oeuvres que toi et ton épouse
Anne avez faites ont été
rapportées à la face du Très-Haut et une postérité vous a été
accordée, telle que, depuis les origines, les prophètes et les saints
n'en ont eue, telle qu'ils n'en auront jamais. Joachim, s'étant réveillé,
appela ses bergers et leur rapporta son songe. Et ils adorèrent le
Seigneur et lui dirent : Veille à ne pas contrecarrer l'ange de Dieu.
Mais, lève-toi, partons, et allons doucement tandis que nos troupeaux
paissent en chemin. Il
y avait trente jours qu'ils marchaient et ils approchaient, quand Anne,
qui était en prière, vit paraître un ange qui lui dit : Va à la Porte
qu'on appelle Dorée, pour y rencontrer ton époux, car il va te revenir
aujourd'hui. En hâte, elle s'y rendit avec ses servantes , et elle se
tint près de la dite porte en prières. Elle attendait de puis déjà
longtemps et commençait à se lasser, quand, levant les yeux, elle vit
Joachim arriver avec ses troupeaux. Elle courut se jeter à son cou,
rendant grâces à Dieu, et disant : J'étais veuve et voici que je ne le
suis plus ; j'étais stérile et voici que j'ai conçu. Et une grande allégresse
se répandit dans tout le voisinageet parmi tous ceux qui la
connaissaient, si bien que tout le pays d'Israël la félicita de cette
gloire. (historique
suite) On
ne saurait tenir pour certains les renseignements que nous donnent
l'apocryphe intitulé le Protévangile de Jacques, mais il faut sans doute
attacher quelque importance à saint Grégoire de Nysse (+ 394) qui donne
Anne et Joachim comme les parents de la sainte Vierge, à saint Sophrone
(3)
qui montre, à Jérusalem, la
maison, la sainte Probatique où l'illustre Anne enfanta Marie, ou à
saint Jean Damascène (+ 749) qui ajoute que de ferventes prières leur
obtinrent dans un âge avancé la naissance d'une fille . Sans doute
faut-il chercher l'origine de la fête de la Nativité de la sainte Vierge
en Orient où le synaxaire de Constantinople4, rédigé selon un décret
de l'empereur Maurice, la marque déjà au 8 septembre, tandis qu'elle est
mentionnée dans les homélies d'André de Crète (660 + 740)5. On
célébrait alors, à Rome, la dédicace de la basilique de saint Hadrien,
martyr6, et l'on ne trouve aucune trace incontestable de la Nativité de
la sainte Vierge avant le pontificat de Serge I°7 ; le Pape, en sandales,
faisait procession de la basilique Saint-Hadrien à celle de Sainte-Marie
Majeure. Dans
l'Histoire des Mystères et des fêtes, Benoît XIV (1740 + 1758) raconte
que, chaque année, au 8 septembre, un solitaire entendait des chants célestes
; quand il en demanda à Dieu la cause, il lui fut répondu que c'était
en l'honneur de la naissance de la Vierge qui se célébrait au ciel,
qu'il devait en avertir les hommes, pour qui elle était née, et obtenir
la célébration sur terre de cet anniversaire ; c'est ainsi que le
solitaire aurait obtenu du Pape la fête de la Nativité de la sainte
Vierge. Saint
Boniface (+ 755) introduisit la fête de la Nativité de la Vierge en
Allemagne où la prescrivit le concile de Salzbourg (799). Si
saint Bède le Vénérable (673 + 735) la connaissait en Angleterre, elle
était absente de la liturgie Mozarabe de Tolède jusqu'au le X° siècle. On
ne la vit guère en France avant l'époque capétienne et sans doute la
doit-on à saint Fulbert de Chartres (+ 1028)8 et au roi Robert II le
Pieux (970 + 1031). Et saint Bernard d'écrire aux chanoines de Lyon : La
sainte Eglise ne se trompe pas quand elle considère ce jour comme saint
et le célèbre chaque année à la joie de toute la terre. Lorsque
mourut le pape Célestin IV (1243), l'empereur Frédéric II retint les
cardinaux prisonniers afin d'empêcher la réunion du conclave ; les
cardinaux firent le voeu solennel de donner un octave à cette fête qui
existait déjà depuis saint Anselme dans l'Eglise d'Angleterre, s'ils
recouvraient leur liberté, ce que fit leur élu, Innocent IV, au premier
concile de Lyon (1245). Grégoire
X en célébra la vigile en 1377, à Agnani. 4
Un synaxaire est un livre liturgique qui rassemble pour chaque jour les
lectures et la vie des saints que l'on célèbre. 5
Flavius Mauricius Tiberius, excellent stratège et politicien prudent , né
vers 539 et décapité en 602, fut le dernier empereur byzantin à imposer
la langue latine à sa cour.
Membre d'une famille romaine de Cappadoce, il fut stratège
autocrator (578) pour combattre les Perses qui furent vaincus en 581.
Il épousa la fille de l'empereur Tibère II qui le désigna comme
son successeur. Maurice réorganisa l'administration et l'armée de
l'empire, créa les exarchats de Ravenne (pour l'Italie) et de Carthage
(pour l'Afrique), gagna une partie de l'Arménie, rétablit la paix en
Mauritanie, repoussa les Avars et les Slaves dans les Balkans et contint
tant bien que mal les Lombards en Italie. Il se rendit impopulaire par des
mesures économiques pour l'organisation de l'armée et fut mis à mort
par Phocas qui prit sa place. 6
Saint Hadrien, martyr de Nicomédie sous Maximien, qui mourut un 4 mars et
dont les reliques auraient été transférées à Rome un 8 septembre,
vers 303 ou 312. 7
Saint Serge Ier, dont on célèbre d'ailleurs aussi la fête au 8
septembre, naquit au sein d'une famille syrienne établie à Palerme
(Sicile) ; il vint à Rome sous le pontificat d'Adéodat II (672 + 676)
qui l'admit parmi ses clercs comme membre de la Schola Cantorum ; acolyte
vers 680, puis prêtre, saint Léon II lui confia le titre de
Sainte-Suzanne où il fut un si remarquable pasteur que le clergé et le
peuple de Rome l'élit pape (décembre 687). L'archidiacre Pascal, patronné
par l'exarque byzantin de Ravenne, s'était installé à l'extérieur du
Latran et l'archiprêtre Théodore occupait le reste du palais, tandis que
les électeurs étaient réunis au Palatin près du représentant de
Byzance ; comme l'archidiacre Pascal avait promis une belle récompense à
l'exarque de Ravenne s'il était élu pape, il fallut que le nouveau pape,
pour éviter des complications, lui
versât cent livres d'or.
Serge I° introduit l'Agnus Dei dans la messe après la fraction du
pain et régla les quatre grandes fêtes mariales (Annonciation,
Dormition, Nativité, Purification). Il mourut en 701 en laissant une véritable
réputation de sainteté et fut inhumé, un 8 septembre, à Saint-Pierre. 8
Après d'autres fêtes plus anciennes de la sainte Vierge, la piété des
fidèles n'a été satisfaite que quand on a jouté la fête solennelle de
ce jour (Fulbert de Chartres : sermon pour la Nativité de la Vierge). Sa
cathédrale ayant été détruite par un incendie la nuit même de la fête,
il jeta les fondements d'un édifice grandiose. Il
convenait que le miracle des miracles, l'enfantement d'une vierge, fût préparé
par un miracle qui y eut quelque ressemblance. J'en donnerai une raison
plus élevée et plus divine : il faut que dans cette conception la nature
ne devance pas la grâce, qu'elle ne produise pas son fruit avant que la
grâce ne donne le sien. Dans cette naissance nous voyons fleurir le désert. Saint
Jean Damascène C'est
le commencement du salut, l'origine de toute fête ; voici qu'est née la
Mère de l'Epoux ! A bon droit, l'univers aujourd'hui tressaille, et l'Eglise
pleine d'allégresse chante des cantiques d'épithalame. Saint
Pierre Damien Elle
naît à petit bruit, sans que le monde en parle et sans qu'Israël même
y pense, bien qu'elle soit la fleur d'Israël et la plus éminente de la
terre ; mais, si la terre n'y pense pas, le ciel la regarde et la vénère
comme celle que Dieu a fait naître pour un si grand sujet et pour rendre
un si grand service à sa propre personne, c'est-à-dire pour le revêtir
un jour d'une nouvelle nature. Pierre
de Bérulle O
Marie, Je
vous salue, Marie, Je
vous salue, Marie, Des
louanges de la Bienheureuse Marie (St Epiphane) Elle
eut pour parents Joachim et Anne, Joachim signifie la préparation du
Seigneur, et en effet il prépara la venue sur terre du Fils de Dieu. Anne
signifie grâce : la fille qu'ils obtinrent de Dieu dans un âge avancé
était une grâce précieuse. Cette trinité terrestre rendait hommage
ici-bas à la Trinité céleste. Saint
Epiphane Première
homélie pour la nativité de la Vierge Marie Neuf
mois étant accomplis, Anne mit au monde une fille et l'appela du nom de
Marie. Quand elle l'eut sevrée, la troisième année, Joachim et elle se
rendirent au temple du Seigneur et, ayant offert au Seigneur des victimes,
ils présentèrent leur petite fille Marie pour qu'elle habitât avec les
vierges qui, nuit et jour, sans cesse, louaient Dieu. Quand
elle eut été amenée devant le temple du Seigneur, Marie gravit en
courant les quinze marches sans se retourner pour regarder en arrière et
sans regarder ses parents comme le font les petits enfants. Et cela frappa
d'étonnement toute l'assistance, au point que les prêtres du Temple
eux-mêmes étaient dans l'admiration. Puisque
la Vierge Marie devait naître d'Anne, la nature n'a pas osé devancer le
germe béni de la grâce. Elle est restée sans fruit jusqu'à ce que la
grâce eût porté le sien. En effet il s'agissait de la naissance, non
d'un enfant ordinaire, mais de cette première-née d'où allait naître
le premier-né de toute créature, en qui subsistent toutes chose. O
bienheureux couple, Joachim et Anne ! Toute la création vous doit de la
reconnaissance, car c'est en vous et par vous qu'elle offre au créateur
le don qui surpasse tous les dons, je veux dire la chaste Mère qui était
seule digne du Créateur. Aujourd'hui
sort de la souche de Jessé le rejeton sur lequel va s'épanouir pour le
monde une fleur divine. Aujourd'hui Celui qui avait fait autrefois sortir
le firmament des eaux crée sur la terre un ciel nouveau, formé d'une
substance terrestre ; et ce ciel est beaucoup plus beau, beaucoup plus
divin que l'autre, car c'est de lui que va naître le soleil de justice,
celui qui a créé l'autre soleil.... Que
de miracles se réunissent en cette enfant, que d'alliances se font en
elle ! Fille de la stérilité, elle sera la virginité qui enfante. En
elle se fera l'union de la divinité et de l'humanité, de l'impassibilité
et de la souffrance, de la vie et de la mort, pour qu'en tout ce qui était
mauvais soit vaincu par le meilleur. O fille d'Adam et Mère de Dieu ! Et
tout cela a été fait pour moi, Seigneur ! Si grand était votre amour
pour moi que vous avez voulu, non pas assurer mon salut par les anges ou
quelque autre créature, mais restaurer par vous-même celui que vous
aviez d'abord créé vous-même. C'est pourquoi je tressaille d'allégresse
et je suis plein de fierté, et dans ma joie, je me tourne vers la source
de ces merveilles, et emporté par les flots de mon bonheur, je prendrai
la cithare de l'Esprit pour chanter les hymnes divins de cette
naissance... Aujourd'hui
le créateur de toutes choses, Dieu le Verbe compose un livre nouveau
jailli du cœur de son Père, et qu'il écrit par le Saint-Esprit, qui est
langue de Dieu... O
fille du roi David et Mère de Dieu, Roi universel. O divin et vivant
objet, dont la beauté a charmé le Dieu créateur, vous dont l'âme est
toute sous l'action divine et attentive à Dieu seul ; tous vos désirs
sont tendus vers cela seul qui mérite qu'on le cherche, et qui est digne
d'amour ; vous n'avez de colère que pour le péché et son auteur. Vous
aurez une vie supérieure à la nature, mais vous ne l'aurez pas pour
vous, vous qui n'avez pas été créée pour vous. Vous l'aurez consacrée
tout entière à Dieu, qui vous a introduite dans le monde, afin de servir
au salut du genre humain, afin d'accomplir le dessein de Dieu, I'Incarnation
de son Fils et la déification du genre humain. Votre cœur se nourrira
des paroles de Dieu : elles vous féconderont, comme l'olivier fertile
dans la maison de Dieu, comme l'arbre planté au bord des eaux vives de
l'Esprit, comme l'arbre de vie, qui a donné son fruit au temps fixé : le
Dieu incarné, la vie de toutes choses. Vos pensées n'auront d'autre
objet que ce qui profite à l'âme, et toute idée non seulement
pernicieuse, mais inutile, vous la rejetterez avant même d'en avoir senti
le goût. Vos
yeux seront toujours tournés vers le Seigneur, vers la lumière éternelle
et inaccessible ; vos oreilles attentives aux paroles divines et aux sons
de la harpe de l'Esprit, par qui le Verbe est venu assumer noire chair...
vos narines respireront le parfum de l'époux, parfum divin dont il peut
embaumer son humanité. Vos lèvres loueront le Seigneur, toujours attaché
aux lèvres de Dieu. Votre bouche savourera les paroles de Dieu et jouira
de leur divine suavité. Votre cœur très pur, exempt de toute tache,
toujours verra le Dieu de toute pureté et brûlera de désir pour lui.
Votre sein sera la demeure de celui qu'aucun lieu ne peut contenir. Votre
lait nourrira Dieu, dans le petit enfant Jésus. Vous êtes la porte de
Dieu, éclatante d'une perpétuelle virginité. Vos mains porteront Dieu,
et vos genoux seront pour lui un trône plus sublime que celui des chérubins...
Vos pieds, conduits par la lumière de la loi divine, le suivant dans une
course sans détours, vous entraîneront jusqu'à la possession du
Bien-Aimé. Vous êtes le temple de l'Esprit-Saint, la cité du Dieu
vivant, que réjouissent les fleuves abondants, les fleuves saints de la
grâce divine. Vous êtes toute belle, toute proche de Dieu ; dominant les
Chérubins, plus haute que les Séraphins, très proche de Dieu lui-même. Salut,
Marie, douce enfant d'Anne ; l'amour à nouveau me conduit jusqu'à vous.
Comment décrire votre démarche pleine de gravité ? votre vêtement ? le
charme de votre visage ? cette sagesse que donne l'âge unie à la
jeunesse du corps ? Votre vêtement fut plein de modestie, sans luxe et
sans mollesse. Votre démarche grave, sans précipitation, sans heurt et
sans relâchement. Votre conduite austère, tempérée par la joie,
n'attirant jamais l'attention des hommes. Témoin cette crainte que vous
éprouvâtes à la visite inaccoutumée de l'ange ; vous étiez soumise et
docile à vos parents ; votre âme demeurait humble au milieu des plus
sublimes contemplations. Une parole agréable, traduisant la douceur de l'âme.
Quelle demeure eût été plus digne de Dieu ? Il est juste que toutes les
générations vous proclament bienheureuse, insigne honneur du genre
humain. Vous êtes la gloire du sacerdoce, l'espoir des chrétiens, la
plante féconde de la virginité. Par vous s'est répandu partout
l'honneur de la virginité Que ceux qui vous reconnaissent pour la Mère
de Dieu soient bénis, maudits ceux qui refusent... O
vous qui êtes la fille et la souveraine de Joachim et d'Anne, accueillez
la prière de votre pauvre serviteur qui n'est qu'un pécheur, et qui
pourtant vous aime ardemment et vous honore, qui veut trouver en vous la
seule espérance de son bonheur, le guide de sa vie, la réconciliation
auprès de votre Fils et le gage certain de son salut. Délivrez-moi du
fardeau de mes péchés, dissipez les ténèbres amoncelées autour de mon
esprit, débarrassez-moi de mon épaisse fange, réprimez les tentations,
gouvernez heureusement ma vie, afin que je sois conduit par vous à la béatitude
céleste, et accordez la paix au monde. A tous les fidèles de cette
ville, donnez la joie parfaite et le salut éternel, par les prières de
vos parents et de toute l'Eglise. Saint
Jean Damascène |
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